Au cours des dernières années, un minimum de 38 tremblements de terre au Nord-Est de la Colombie-Britannique ont été causés par la fracturation hydraulique (communément appelée fracturation), selon un rapport de la Commission du pétrole et du gaz de la Colombie-Britannique. Des études ont démontré que les séismes sont chose courante dans plusieurs régions où l’on procède à l’extraction du gaz naturel.
Il n’est pas étonnant que des secousses puissent se manifester à la suite de l’injection d’énormes quantités d’eau, de sable et de produits chimiques à très haute pression dans le sol dans le but d’y exploiter les gaz de schiste et de libérer le gaz naturel. Cependant, les tremblements de terre ne constituent pas le pire des problèmes engendrés par la fracturation.
La fracturation hydraulique requiert d’énormes quantités d’eau. L’évacuation des eaux usées toxiques, sans mentionner les déversements accidentels, peut contaminer l’eau potable et nuire à la santé humaine. De plus, l’extraction des eaux usées dans le sol peut augmenter davantage le risque de secousse sismique. La fuite de gaz crée également des problèmes, comme celui de rendre l’eau potable inflammable! Dans certains cas, l’eau potable enflammée provient des fuites de méthane engendrées par la fracturation. Le méthane constitue un gaz à effet de serre plus puissant que le dioxyde de carbone!
Ces phénomènes représentent tous de graves sources d’inquiétude — mais même s’ils ne s’avèrent pas être la pire des menaces causées par la fracturation. Le plus gros problème est que nous avons à faire face, une fois de plus, à une dépendance aux combustibles fossiles menant à la destruction. Tandis que les réserves de pétrole, de gaz et de charbon facilement accessibles s’épuisent graduellement, les sociétés s’intéressent de plus en plus aux sources dites « non conventionnelles », comme celles des sables bitumineux, celles en eau profonde, ou encore celles incrustées dans les dépôts de gaz de schiste enfouis dans le sol.
Résultat, nous nous retrouvons face à des catastrophes, comme le déversement et le décès de 11 travailleurs survenus suite à l’explosion de la plateforme Deepwater Horizon dans le Golfe du Mexique en 2010. Nous fermons les yeux sur la dévastation environnementale massive des sables bitumineux, notamment la contamination de l’eau, de la terre et de l’air; la destruction de la forêt boréale; les espèces en péril, comme le caribou; et les répercussions sur la santé humaine. Nous éliminons les sommets des montagnes afin d’obtenir du charbon. Nous réalisons que l’épuisement de l’approvisionnement en eau, quelques tremblements de terre, et l’eau empoisonnée sont le prix à payer afin de maintenir un mode de vie intégrant une consommation de combustibles fossiles.
Comme le souligne Bill McKibben, il n’était pas nécessaire que les choses se déroulent ainsi. « Nous aurions pu, en tant que civilisation, prendre cette baisse de disponibilité et ces prix croissants comme un signe pour commencer à avoir recours au soleil et au vent, et à d’autres formes d’énergie sans carbone », a-t-il écrit dans la revue des livres du journal New York Times, en ajoutant « il aurait donc été parfaitement logique d’agir de la sorte, surtout parce que cela aurait aidé à la lutte contre le réchauffement de la planète, le plus grand défi auquel l’humanité fait face ».
Certaines personnes, la plupart provenant de l’industrie des combustibles fossiles, apportent l’argument que le gaz naturel pourrait être un combustible « transitoire » pendant que nous travaillons à accroître le développement de l’énergie renouvelable et de sa capacité, en fournissant une source d’énergie produisant moins d’émissions de gaz à effet de serre lors de la combustion que celles que produisent le charbon et le pétrole.
Toutefois, de nombreuses études, dont une effectuée par la Fondation David Suzuki et l’Institut Pembina, ont révélé que cette théorie s’est avérée extrêmement problématique. D’abord, les fuites de gaz naturel, un gaz à effet de serre puissant en soi, en plus du méthane qui est souvent enfoui avec lui, contribuent au réchauffement de la planète. La combustion du gaz naturel et l’activité industrielle nécessaire pour son extraction et son transport contribuent également à la production d’émissions de gaz à effet de serre. Comme le mentionne McKibben, le Centre national américain de Recherches atmosphériques a conclu que le transfert au gaz naturel « aiderait à peine à résoudre le problème lié aux changements climatiques ».
Avant toute chose, l’investissement continu et croissant dans les activités d’extraction du gaz naturel, ainsi que les infrastructures, ralentiraient l’investissement dans l’énergie renouvelable et la transition vers cette dernière. Les entreprises qui construisent des centrales d’énergie alimentées au gaz voudront-elles cesser leurs activités, ou payer des coûts élevés pour la capture et le stockage du carbone pendant que le monde demande sérieusement que l’on réduise dramatiquement les émissions de gaz à effet de serre? Tout comme les combustibles fossiles produits par les sources conventionnelles qui sont restreintes et qui s’épuisent graduellement, ceux des sources occasionnant des difficultés s’épuiseront également. Si nous mettons toute notre énergie et toutes nos ressources dans la poursuite de l’extraction de combustibles, nous perdrons l’occasion d’investir dans l’énergie renouvelable.
Si nous voulons contrer le problème du réchauffement de la planète et les autres problèmes environnementaux liés à notre empressement continu à brûler nos précieux combustibles fossiles aussi vite que possible, nous devons apprendre à utiliser nos ressources de façon plus judicieuse, se débarrasser de notre dépendance et de s’empresser d’opter plutôt pour des ressources dont les répercussions négatives sont moindres.
Rédigé avec les contributions de Jode Roberts, Spécialiste en communications de la Fondation David Suzuki.
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